Une véritable guerre fratricide !

C'était une véritable guerre fratricide ! 

Tout à commencé pour moi à la fin des années 1950, et surtout dans les années 1960, avec un abonnement au journal de Tintin.

Nous étions nés, mes frères, notre soeur et moi, en temps de paix, mais je peux vous affirmer qu'entre nous régnait parfois, pratiquement tous les jeudis (journée sans école à l'époque), une véritable guerre, surtout entre les trois ainés.

Seul un puissant seigneur ayant autorité sur ce petit monde aurait pu mettre fin à ces querelles de baronets en confisquant le talisman à son profit. Mais papa rentrait tard de son travail en général. Guerre il y avait donc, le plus souvent.

Oui, la guerre ... pour être le premier à se saisir du magazine dans la boite aux lettres.

L'objet arrivait plié en deux dans le sens de la hauteur, tenu par un étroit bandeau de papier kraft portant notre adresse. Et le premier à s'en saisir avait alors le privilège de lire les épisodes de la semaine à son rythme - harcelé toutefois par les deux autres qui lisaient par dessus ses épaules. L'un demandant que l'on tourne la page plus vite, car il avait fini sa lecture et attendait impatiemment la suite ; l'autre que l'on revienne en arrière, car il n'avait pas terminé la page précédente. C'était un véritable calvaire.

L'idéal était de se saisir discrètement du magazine et de courrir, sans se faire remarquer, s'enfermer dans les toilettes afin de le lire en paix.

Il y avait bien alors quelques menaces lancées derrière la porte vérouillée ; voire des tentatives d'intimidation - du genre : "'Tu vas voir à la sortie", ou "Tu vas attendre longtemps ton tour la prochaine fois", ou encore "Laisse moi la place, j'ai un besoin urgent !". Mais ça ne prenait pas, et ça se calmait assez vite.

Ah, comment vous faire comprendre l'intensité du plaisir d'une lecture tranquille.

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